Aux États-Unis, la réglementation encadrant l’étiquetage des préparations commerciales pour nourrissons est minimale. Tant que les allégations nutritionnelles utilisées ne sont pas interdites par la loi, qu’elles sont honnêtes et qu’elles ne sont pas trompeuses, les manufacturiers ont le champ libre. Dans un document publié en septembre, l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) fait un premier pas pour inciter les fabricants à s’assurer que leurs affirmations reposent bien sur des preuves solides.
Il faut le dire, l’étiquetage des préparations commerciales est un peu hors de contrôle au sud de notre frontière. Un article sur le site STAT fait d’ailleurs référence à une étude publiée en mai 2016. Celle-ci démontrait que les allégations qu’on retrouve sur les emballages de préparations commerciales ne sont pas toujours fondées. Ainsi, sur 22 préparations commerciales pour nourrissons en vente aux États-Unis, 13 se vantaient de pouvoir prévenir les coliques et l’irritabilité du bébé. Pourtant, il n’existe aucune étude scientifique appuyant ces prétentions à ce jour.
La FDA a donc rédigé un document pour guider les manufacturiers qui souhaitent démontrer que les ingrédients qu’ils ajoutent à leur produit ont réellement un effet sur la santé des nourrissons. Ces recommandations insistent ainsi sur le type d’étude à effectuer et sur les critères à respecter dans l’élaboration de ces expériences.
Bien que cette initiative soit louable, elle n’a pas force de loi. La FDA prend d’ailleurs bien soin de rappeler qu’elle ne fait que suggérer une procédure à suivre pour les fabricants. Ces derniers sont donc tout à fait libres de la suivre ou non. Par ailleurs, le document ne constitue qu’une ébauche et la FDA demeure ouverte aux commentaires qu’il pourrait susciter.
Au Canada
De notre côté de la frontière, l’étiquetage des préparations commerciales pour nourrissons est régi par le Règlement sur les aliments et drogues. Ce règlement permet certaines allégations bien précises. Cependant, selon l’Agence d’inspection des aliments, «tous les fabricants souhaitant faire des allégations fonctionnelles doivent posséder des preuves scientifiques pour valider l’allégation avant de l’utiliser sur les étiquettes alimentaires ou dans les annonces».
Par exemple, il est acceptable de trouver une mention du type «contient de l’ADH (un acide gras oméga-3) et de l’AA (un acide gras oméga 6) ajoutés». Toutefois, une allégation vague comme «l’ADH aide le rendement cognitif» n’est pas acceptable. Les fabricants doivent plutôt écrire «L’ADH, un acide gras oméga-3, contribue au développement normal du cerveau, des yeux et des nerfs, principalement chez les enfants de moins de deux ans». En effet, l’Institute of Medicine a affirmé en 2005 que «le cerveau en développement accumule de hauts niveaux d’ADH durant les périodes pré et postnatales et [que] cette accumulation se poursuit tout au long des 2 années suivant la naissance». Cette allégation est donc jugée crédible selon l’Agence.
De la même façon, l’Agence d’inspection des aliments considère que la digestion est un processus trop complexe pour qu’on puisse affirmer que l’ajout ou le retrait d’un ingrédient peut la faciliter. De plus, toutes les préparations sur le marché doivent démontrer qu’elles sont digestibles. Il est donc interdit d’écrire «facile à digérer» sur une étiquette sans l’accompagner d’une mention telle que «comme toute préparation pour nourrissons, ce produit est facile à digérer».
Sur les tablettes
Les fabricants réussissent toutefois à passer leurs messages marketing en utilisant une technique vieille comme le monde : les petits caractères. Par exemple, sur l’étiquette de la préparation Bon Départ de Nestlé, on peut lire en gros caractères «Facile à digérer». En plus petit, dans le bas de l’étiquette, ils ajoutent toutefois «toutes les préparations sont conçues pour êtres faciles à digérer».
Ces techniques marketing ont une importance capitale dans le marché des préparations commerciales. En effet, en se basant sur les avantages de certains ingrédients, les fabricants peuvent hausser le prix de leurs préparations. Ainsi, la boîte de 663 g d’Enfamil A+ qui contient des acides gras ADH se vend 37,79 $ alors que la boîte de 900 g d’Enfamil régulier qui contient aussi moins de fer se vend 30,59 $. Il s’agit d’une différence de 2,30 $ par 100 g.
Le milieu de la santé met beaucoup d’effort pour favoriser l’allaitement et c’est très bien. Cependant, les mères qui ont recours aux préparations commerciales pour nourrisson, que ce soit par choix ou par nécessité, ont le droit d’être informées adéquatement sur les propriétés réelles de ces produits. Comme pour l’ensemble des aliments, les mères doivent être en mesure de bien comprendre les étiquettes des préparations pour nourrisson. Il faut donc saluer toutes les initiatives favorisant un marketing honnête et transparent de ces produits.
Références:
Food and Drug Administration. (2016) Substantiation for Structure/Function Claims Made in Infant Formulas Label and Labeling: Guidance for industry.
Kaplan, Sheila. (2016, 8 septembre) Allergy-proof? Intelligence booster? FDA looks to rein in health claims for baby formula. STAT.
Belamarich, P.F. et al. (2015) A Critical Review of the Marketing Claims of Infant Formula Products in the United States. Clin Pediatr, vol. 55, no. 5, p. 437-442.
Agence canadienne d'inspection des aliments. (2016) Allégations santé - allégations fonctionnels.
Agence canadienne d'inspection des aliments. (2016) Allégations santé - allégations nutritionnelles fonctionnelles.
Agence canadienne d'inspection des aliments. (2015) Exigence en matière d'étiquetage des aliments pour bébé, des préparations pour nourrissons et du lait maternel - Préparation pour nourrissons.