La maladie coeliaque est une maladie auto-immune qui affecte entre 0,5 et 2,0 % de la population. Pour développer la maladie, un enfant doit avoir une prédisposition génétique, en plus d'être exposé au gluten ou à des prolamines, des molécules se retrouvant dans le blé, le seigle ou l'orge. Lorsqu'un individu atteint consomme ces céréales, son système immunitaire réagit causant des lésions intestinales.
Entre 1984 et 1996, la Suède a connu une épidémie de maladie coeliaque, la fréquence ayant augmenté par quatre fois pendant cette décennie. Cet effet spectaculaire laisse présumer qu'un facteur environnemental augmenterait les risques de développer cette maladie. Le monde scientifique s'est donc mis à la recherche d'un élément auquel aurait été exposé les enfants, qui aurait changé subitement et qui pourrait affecter le système immunitaire. Un suspect potentiel répond à cette description: la vaccination précoce.
En Suède, les enfants reçoivent neuf vaccins de routine. Instaurés dans les années 1940, ces vaccins ont bien entendu beaucoup changé et évolué au cours des années. Par ailleurs, les vaccins agissant en modulant le système immunitaire, plusieurs personnes croient qu'ils pourraient jouer un rôle dans l'apparition de certaines maladies auto-immunes comme le diabète de type 1 ou la maladie coeliaque. Toutefois, dans le cas de cette dernière, l'hypothèse n'avait jamais été vérifiée.
Des chercheurs suédois ont donc tenté d'établir si les changements au programme de vaccination en Suède coïncidaient avec l'épidémie de maladie coeliaque des années 1980-90.
Ils ont ainsi remarqué que deux ans avant le début de l'épidémie, le vaccin MMR (rougeole-rubéole-oreillons) combiné a remplacé les deux vaccins séparés contre la rubéole et la rougeole. Toutefois, selon les chercheurs, ce changement survient trop tôt pour expliquer l'épidémie. Au contraire, l'introduction en 1996 du vaccin Pa (contre la coqueluche) coïncide plutôt avec la fin du phénomène. Enfin, le vaccin Hib (contre les méningites et les otites) a été introduit en 1992, c'est-à-dire au milieu de l'épidémie et ne peut donc pas expliquer les cas de la première moitié de la décennie.
De plus, lorsqu'on compare les enfants atteints de la maladie coeliaque avec des enfants en santé, on ne remarque pas de différences au niveau des taux de vaccination pour les différents vaccins mentionnés plus haut. En fait, la seule exception est le vaccin contre la tuberculose qui semble avoir un effet légèrement protecteur.
Les chercheurs concluent ainsi que la vaccination n'est pas responsable de l'augmentation des cas de maladie coeliaque entre 1984 et 1996. Le mystère de l'épidémie de maladie coeliaque reste donc entier.
Toutefois, cette étude démontre combien il est complexe d'établir un lien de cause à effet entre un facteur environnemental et une maladie. Cela est d'autant plus vrai dans le cas des vaccins puisque ceux-ci diffèrent beaucoup les uns des autres. Il faut donc être très prudent avant d'avancer qu'un tel vaccin cause telle maladie ou, au contraire, qu'un vaccin en particulier est complètement sécuritaire. Le débat entre les mouvements "pro" et "anti" vaccination risque donc de continuer pendant encore plusieurs années.
Référence: Anna Myléus, Hans Stenlund, Olle Hernell, Leif Gothefors, Marie-Louise Hammarström, Lars-Åke Persson and Anneli Ivarsson. (2012) Early Vaccinations Are Not Risk Factors for Celiac Disease. Pediatrics; 130:1 e63-e70; published ahead of print June 25, 2012.